Connect with us

Énergie & Recharge

Droujba: l’oléoduc géant au cœur des tensions énergétiques européennes

Published

on

Droujba: l'oléoduc géant au cœur des tensions énergétiques européennes

L’Europe et la Russie toujours connectées par l’oléoduc Droujba, dernière artère énergétique entre deux mondes

L’Europe a-t-elle vraiment coupé ses liens énergétiques avec la Russie depuis le début du conflit ukrainien? Contrairement à ce que l’on pourrait penser après le sabotage des gazoducs Nord Stream en septembre 2022, le continent européen maintient encore d’importantes connexions avec les ressources fossiles russes. Cette réalité alimente aujourd’hui de vives tensions au sein de l’Union européenne.

Au cœur de cette controverse se trouvent particulièrement deux nations: la Hongrie et la Slovaquie, toutes deux membres de l’UE et de l’OTAN. Ces pays continuent d’importer massivement des hydrocarbures russes, avec Budapest qui dépend encore à 86% de Moscou pour ses approvisionnements pétroliers. Cette dépendance persiste grâce à Droujba, une infrastructure colossale qui constitue le dernier point de raccordement direct entre l’Europe et les champs pétroliers russes, s’étendant sur plus de 4 000 kilomètres et traversant le sud de la capitale hongroise.

Les 4 000 km du pipeline Droujba

L’oléoduc Droujba se divise en deux branches principales à partir de la Biélorussie. La section nord poursuit son chemin vers la Pologne avant d’atteindre Rostock en Allemagne. La partie sud, quant à elle, traverse le territoire ukrainien à l’ouest de Kiev, passant notamment par la localité de Brody. Une fois la frontière hongroise franchie, c’est le groupe pétrolier national MOL qui prend en charge la gestion de cette infrastructure stratégique.

En anglais, ce pipeline est également connu sous les appellations « Druzhba », « Friendship » ou encore « Comecon ». Cette gigantesque conduite prend sa source dans la région de Samara en Russie. Sa construction remonte à 1959, décidée par le Conseil d’assistance économique mutuelle, organisation créée par Staline dix ans plus tôt pour favoriser la coopération économique entre pays du bloc communiste. La mise en service de l’oléoduc est intervenue en 1963, il y a maintenant plus de soixante ans.

Droujba : l’Ukraine attaque, Donald Trump défend (la Hongrie)

Après le sabotage des gazoducs Nord Stream, c’est désormais l’oléoduc Droujba qui se retrouve dans la ligne de mire. Les forces ukrainiennes ont mené trois opérations offensives durant le mois d’août: deux dans la région frontalière de Briansk les 13 et 23 août, et une troisième plus à l’est, dans la région de Tambov, le 18 août. Parallèlement, Bruxelles envisage d’imposer des sanctions financières d’ici 2027 aux pays continuant d’importer du pétrole russe.

La position américaine sur cette question a récemment connu un revirement significatif. Alors que Washington soutenait initialement l’idée de pénalités et appelait tous les membres de l’OTAN à cesser leurs achats d’énergies russes, le président Donald Trump a changé de cap. Il apporte désormais son soutien à Viktor Orbán, reconnaissant l’argument hongrois selon lequel l’enclavement géographique du pays et l’absence d’accès maritime direct limitent considérablement ses alternatives d’approvisionnement.

Selon le média pro-gouvernemental hongrois Origo, lors d’un échange téléphonique fin septembre, Donald Trump aurait manifesté sa compréhension concernant la situation énergétique hongroise, admettant les difficultés structurelles d’un pays sans littoral. Le président américain aurait également étendu cette bienveillance à la Slovaquie, jugeant « injustes » les reproches adressés à ces deux pays quant à leur dépendance énergétique vis-à-vis de Moscou.

Oléoduc Adria : un approvisionnement par le sud « insuffisant »

Pour sortir de cette impasse énergétique, une solution alternative existe théoriquement: l’oléoduc Adria, qui relie la Hongrie à la mer Adriatique via la Croatie, permettant potentiellement d’acheminer du pétrole norvégien et américain. Cependant, Budapest affirme que cette infrastructure ne répond pas aux besoins du pays, invoquant des obstacles techniques.

à lire également :  Wall Connector Tesla : Conseils, Installation et Prix

Dans un communiqué officiel publié le 26 septembre, le groupe MOL a fait état de tests conjoints menés avec son partenaire croate sur l’oléoduc Adria, qualifiant les résultats d' »insuffisants ». Selon l’entreprise hongroise, les essais n’ont jamais permis d’atteindre la pleine capacité opérationnelle pendant plus de deux heures consécutives, remettant en question la viabilité à long terme de cette alternative pour approvisionner la Hongrie et la Slovaquie.

MOL affirme avoir investi 170 millions de dollars dans le développement d’infrastructures alternatives au sud « avant même le déclenchement du conflit » pour réduire sa dépendance à l’axe oriental. L’entreprise renvoie la responsabilité au côté croate, soulignant qu’il faudrait atteindre une capacité quotidienne de 40 000 tonnes, soit 14 millions de tonnes annuelles de brut, pour satisfaire les besoins énergétiques des deux pays.

Le cas tchèque et la structure actionnariale de MOL posent problème

La République tchèque offre un contraste saisissant avec ses voisins. Entre mars et avril, Prague est parvenue à se libérer de sa dépendance aux hydrocarbures russes après 60 années d’approvisionnement via Droujba. Les 40% de besoins énergétiques auparavant couverts par Moscou sont maintenant satisfaits grâce à l’oléoduc transalpin (TAL), connecté à la mer Adriatique depuis Trieste, suite à des travaux d’expansion ayant coûté 60 millions d’euros.

Maintenant que la République tchèque s’est affranchie de cette dépendance, Bruxelles souhaite durcir le ton envers les deux derniers récalcitrants. La Hongrie, qui facture le pétrole 5% plus cher à ses citoyens que dans le reste de l’Europe, risque de subir d’importantes pertes financières, car MOL tire des bénéfices considérables de l’exploitation de Droujba.

Premier groupe coté à la Bourse de Budapest, MOL possède une structure actionnariale complexe. Bien que détenue en partie par des investisseurs étrangers, principalement américains, l’entreprise reste majoritairement sous contrôle de l’État hongrois, qui l’avait secourue financièrement en 2011. Cette mainmise gouvernementale a été partiellement dissimulée via la distribution gratuite d’actions de série B à diverses fondations comme la MOL New Europe Foundation (10,49%), Maecenas Universitatis Corvini Alapítvány (10%), et Tihany Foundation (10%).

Cette imbrication d’intérêts économiques et politiques autour de l’oléoduc Droujba crée d’importantes tensions diplomatiques. Suite aux frappes ukrainiennes d’août visant des points stratégiques du pipeline, la Hongrie a vivement réagi, qualifiant ces actions de « révoltantes » et « scandaleuses ». Les forces ukrainiennes poursuivent néanmoins leurs offensives contre les infrastructures pétrolières russes, avec cinq raffineries contraintes de cesser leurs activités après ces attaques, la plus récente ayant ciblé Afipsky le 26 septembre.

L’Union européenne se trouve dans une position délicate, incapable d’imposer directement des sanctions à la Hongrie et à la Slovaquie en raison de leur droit de veto. La solution envisagée consiste à instaurer des droits de douane sur les hydrocarbures russes d’ici 2027, stratégie qui permettrait de contourner l’exigence d’unanimité. En attendant, le pétrole russe continue de circuler dans les conduites de Droujba, perpétuant un lien énergétique que l’Europe peine à rompre définitivement avec Moscou.

Advertisement
Fiverr Freelance Web

À partir de 283€ HT / Semaine

Achat & Location

Voir les offres

Articles tendance