Anita Yusof de Malaisie: Une Femme, Une Moto, Sept Continents

L’aventurière malaisienne Anita Yusof poursuit sa mission de parcourir en solitaire les sept continents à moto, affrontant les extrêmes de la nature, ses doutes personnels et les barrières culturelles — le tout sur deux roues.

À 57 ans, Anita Yusof connaît bien les longues routes, la solitude et le scepticisme. De l’Amazonie à l’Antarctique, cette aventurière malaisienne a défié les attentes et réécrit les règles sur ce que signifie être une femme musulmane à moto.

Il y a près d’une décennie, Anita faisait la une des journaux en devenant la première femme musulmane à faire le tour du monde en solitaire à moto — un exploit qui lui a valu une place dans le Livre des Records Asiatiques. Mais pour Anita, un seul voyage ne suffisait pas. Aujourd’hui, elle est de nouveau sur la route avec un nouvel objectif : conquérir les sept continents, seule, sur sa moto.

Sa Yamaha — actuellement en route vers Adélaïde — la transportera à travers l’Outback australien jusqu’à Darwin, avant qu’elle ne commence à sauter d’île en île depuis le Timor oriental vers l’Indonésie pour rentrer en Malaisie. Cette dernière étape marque le chapitre final d’un périple mondial qui s’étend sur chaque continent, sous tous les climats et sur presque tous les types de terrains imaginables.

D’enseignante à pionnière

Née à Batu Pahat et élevée à Ipoh, Anita menait autrefois une vie tranquille comme professeure d’éducation physique à l’Université d’Éducation Sultan Idris. Mais un voyage en sac à dos en solitaire en Europe a éveillé quelque chose de plus profond en elle, et des défis personnels en 2012 l’ont poussée vers la moto. N’ayant pas l’endurance cycliste nécessaire en raison de son métier, on l’a encouragée à essayer plutôt une motocyclette.

Elle a dû tout apprendre depuis le début. Trois ans plus tard, elle traversait déjà des continents en solo.

En 2015, elle a lancé son Global Dream Ride, couvrant quatre continents et 40 pays sur une modeste Yamaha FZ150i de 150cc. À la fin, elle était entrée dans l’histoire. Mais cela ne lui semblait pas suffisant.

Alors en 2019, elle s’est lancée dans le Global Dream Ride 2, cette fois avec l’objectif de parcourir les sept continents — y compris l’étendue glacée de l’Antarctique.

Foi, peur et route à venir

Les voyages d’Anita l’ont menée à travers des paysages aussi divers que dangereux : les plaines glacées du Chili, les jungles denses de l’Amazonie et des vents arctiques assez puissants pour la faire tomber de sa moto. En Guyane, elle a croisé des anacondas. En Alaska, un ours curieux a rôdé autour de sa tente. C’est la nature qui l’a mise à l’épreuve, pas les humains.

"Durant toutes mes années sur la route, c’est la nature qui m’a fait le plus peur — pas les humains," dit-elle. "Mais je trouve ma force dans ma foi. Quand je lutte, je parle à Allah. Je demande du courage."

Son équipement de conduite est intentionnellement neutre pour éviter l’attention indésirable. Elle évite de rouler après la tombée de la nuit et cherche des femmes ou des étudiants quand elle a besoin d’aide. Son approche est prudente, mais sans peur.

Changer les perceptions, un kilomètre à la fois avec Anita

Le hijab d’Anita et son identité ont suscité à la fois bienveillance et préjugés. Dans certains endroits, elle porte un foulard ou un buff pour rester discrète. Mais malgré les défis culturels, son expérience a été majoritairement positive.

"Les gens pensent que le monde est dangereux. Mais ce que j’ai vu, c’est de la gentillesse. Beaucoup de gentillesse," affirme-t-elle. "Des étrangers m’ont accueillie, m’ont aidée et m’ont protégée. Le voyage m’a montré que l’humanité est encore largement bonne."

Et les détracteurs ? Ils n’ont plus d’importance. Quand elle a annoncé pour la première fois son tour du monde, beaucoup dans sa communauté se sont moqués. Une femme ? Musulmane ? Avec seulement trois ans d’expérience en moto ? Mais Anita est revenue non seulement saine et sauve, mais plus forte.

Héritage sur deux roues

Son voyage lui a coûté plus de 200 000 RM (environ 46 000 USD) et des années de planification méticuleuse. Elle ne fait pas cela pour la gloire — elle le fait pour inspirer.

"J’ai choisi cette voie pour créer de l’histoire. Pas seulement pour moi, mais pour toutes les autres femmes à qui l’on dit qu’elles ne peuvent pas."

Alors qu’elle se prépare pour la dernière étape de son périple mondial, Anita emporte avec elle plus que son équipement et sa détermination — elle porte les espoirs de celles qui voient en elle la preuve que les barrières, qu’elles soient culturelles, personnelles ou physiques, peuvent être brisées un kilomètre à la fois.

Dans un monde encore plein de frontières, Anita Yusof les conquiert silencieusement — seule, sur deux roues, avec le vent dans le dos et l’histoire dans ses rétroviseurs.